Wednesday, 17 September 2025

Que signifient les taux de natalité en baisse pour les peuples autochtones au Canada

Elon Musk met en garde contre « l’effondrement démographique ». À très long terme, il n’a pas tort : si l’humanité cessait d’avoir des enfants, il n’y aurait plus personne un jour. Mais sur les horizons qui nous concernent, ceux de cette génération et de la suivante, la question est moins apocalyptique qu’intime : quel avenir préparons-nous à nos enfants et nos peuples s’y reconnaîtront-ils encore ?


Pour les peuples autochtones du Canada, la question démographique n’a jamais été abstraite. On nous a déjà parlés au passé. Pourtant, malgré tout, nous sommes encore là, et ce n’est pas un hasard. Les familles, les tantes, les kokums et les moshums, les communautés et les cérémonies ont protégé la vie. Comme me l’a dit un jour Jody Wilson-Raybould au Parlement, après avoir appris combien j’avais d’enfants : « Tu es béni. » Pendant des années, j’ai entendu le contraire : que les enfants sont un fardeau, un obstacle à une carrière, « trop nombreux ». Mais quiconque a déjà parcouru le pow-wow avec des tout-petits connaît la vérité : les enfants peuvent être exigeants, drôles, généreux, épuisants, et ils sont la raison pour laquelle nous continuons.


Dans nos enseignements, l’Est est la direction où le soleil se lève et d’où viennent les enfants, la première lumière d’un nouveau jour. Les enfants ne sont pas un détail secondaire des politiques ; ils en sont le cœur. Nous commençons nos prières avec eux, parce qu’ils sont l’avenir.



Les chiffres : un record de faiblesse au Canada

 

Le taux de natalité total du Canada, c’est-à-dire le nombre moyen d’enfants par femme, a atteint 1,33 en 2022, le niveau le plus bas jamais enregistré (le seuil de remplacement étant d’environ 2,1). En 2023, il a encore diminué. En même temps, presque toute la croissance démographique provenait de l’immigration internationale : 97,6 % en 2023, contre seulement 2,4 % pour l’accroissement naturel. Ottawa prévoit d’admettre 485 000 nouveaux résidents permanents en 2024 et un demi-million en 2025 et 2026.

 

Ces faits se côtoient difficilement : moins de bébés, plus de nouveaux arrivants. C’est une recette pour un changement démographique rapide, surtout dans les villes où vit désormais la majorité des Autochtones.

 

La natalité autochtone : une convergence avec le reste du Canada

 

Une analyse récente montre que la natalité autochtone est passée sous le seuil de remplacement et converge avec celle des non-Autochtones. Le taux de natalité autochtone s’est maintenu près du remplacement entre 2001 et 2011, mais il est tombé à 1,82 en 2016 et 1,54 en 2021. Dans cet ensemble, les Inuits demeurent au-dessus du remplacement (environ 2,6 en 2021), les Premières Nations inscrites sont tombées à 1,8, tandis que les Métis et les Premières Nations non inscrites sont restés nettement en dessous (environ 1,2).

 

L’écart avec les Canadiens non autochtones s’est presque effacé. La direction est claire : les taux de natalité autochtones baissent.

 

Allons-nous disparaître ?

 

Certains craignent que la faible natalité combinée à une immigration élevée ne relègue les peuples autochtones à une note de bas de page. Je n’y crois pas. L’existence n’est pas une affaire d’arithmétique ; c’est une affaire de gouvernance, de terres, de langues, de culture et de lois. Notre survie n’a jamais dépendu uniquement des naissances. Si cela avait été le cas, le siècle dernier aurait pu nous faire disparaître. Nous sommes encore là parce que nous avons insisté pour être nous-mêmes, en élevant nos enfants dans le cercle de la parenté, de la cérémonie et de la responsabilité.

 

Cependant, la baisse de la fécondité a des conséquences. Nous devons les anticiper, à notre façon et selon nos termes.

 

Il y a une raison pour laquelle les Aînés sourient lorsqu’un bébé rampe dans le cercle. Les enfants sont l’argument vivant en faveur de l’espoir. Ils ne sont pas des « petits monstres ». Ce sont des enseignants de patience, d’humilité et d’amour. Ils transforment des étrangers en tantes. Ils rappellent aux dirigeants pourquoi les budgets existent. Ils nous font avancer en dansant.

Trop souvent, quand une famille autochtone accueille un enfant, la réaction extérieure est cynique : « une autre bouche à nourrir », ou pire, « un autre dossier pour un organisme gouvernemental. » Au lieu de suspicion, célébrons les familles autochtones. Aidons-les, ne leur enlevons pas leurs enfants. Souvenons-nous que chaque enfant est une bénédiction, et que chaque famille qui l’élève dans l’amour et la culture est une réussite.

 

Pendant des générations, les gouvernements ont voulu contrôler nos enfants afin de contrôler notre avenir. Les pensionnats, la rafle des années 1960, les politiques de protection de l’enfance, tout cela visait à briser nos nations en brisant nos familles. Mais nos enfants sont encore là, et ils demeurent notre avenir. Les protéger et les élever selon nos façons est la manière de façonner qui nous sommes et qui nous serons.

 

Quand nous prions le matin, nous faisons face à l’Est pour saluer le soleil et honorer les enfants. Le jour est nouveau. L’avenir aussi. Et nous sommes toujours là.


https://www.demographic-research.org/articles/volume/53/6/ 

 

Enfants, petits « monstres » ou trésors éclatants,
Sans eux, qui porterait nos chants ?
Sans leurs rires, serions-nous encore ici ?
Peuples autochtones, l’avenir vit en eux, infini.


Taux de fécondité total (TFT) historique pour les Premières Nations / Indiens inscrits

Années 1960–1970 :
Les TFT des femmes des Premières Nations étaient très élevés, souvent au-dessus de 6 enfants par femme dans les années 1960.

Dès les années 1970, la fécondité avait déjà commencé à baisser de façon significative (faisant partie de la transition démographique mondiale), mais elle demeurait bien supérieure à la moyenne canadienne.

Par exemple, Ram (2004) estimait la fécondité autochtone à environ 6,8 en 1966–1971, chutant à 4,0 entre 1976–1981.

Années 1980–1990 :
Le déclin s’est poursuivi, mais les taux demeuraient relativement élevés comparativement aux femmes non autochtones.

Entre 1996–2001, le TFT des femmes des Premières Nations se situait autour de 2,9, comparativement à 1,5–1,6 pour les femmes non autochtones.

Années 2000–2010 :

  • 2001 : TFT des Indiens inscrits = 2,45
  • 2006 : 2,39
  • 2011 : 2,55
  • 2016 : 2,11
  • 2021 : 1,82 (en dessous du seuil de remplacement)

 

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