Friday, 5 December 2025

Mettre fin à la discrimination dans la transmission du statut: une responsabilité qui dépasse une seule minister

Je réfléchis depuis longtemps à cette question qui revient sans cesse dans les rassemblements des Premières Nations. Comment mettre fin à la discrimination dans la transmission du statut d’Indien d’une génération à l’autre. Cette question a occupé un panel devant les chefs réunis à Ottawa cette semaine. Le projet de loi S-2 avance au Sénat et, pour la première fois depuis des décennies, il semble enfin possible d’éliminer la règle de la deuxième génération. Pourtant, au cœur de ce débat se trouve une figure qui me touche profondément, la ministre Mandy Gull-Masty.


 

Je le dis sans détour. Je la plains. Non pas par condescendance, mais parce qu’elle a accepté un rôle que jamais une personne autochtone ne devrait porter seule. Elle est devenue, malgré elle, l’agente indienne moderne. Elle est devenue celle qui doit défendre un système conçu pour réduire notre nombre. Elle est devenue la voix publique d’une loi qui ne sert pas les intérêts de nos peuples, mais ceux du gouvernement du Canada.

 

Quand Justin Trudeau est arrivé au pouvoir en 2015, plusieurs se demandaient pourquoi aucun député autochtone n’avait été nommé ministre des Affaires indiennes. Après avoir moi-même servi comme député, je comprends mieux. Une fois à l’intérieur du gouvernement, vous passez vos journées à tenter d’équilibrer trop de responsabilités contradictoires. Vous devez appuyer le premier ministre et la ligne gouvernementale. Ensuite, vous devez essayer de répondre aux attentes de votre peuple. Vous portez vos convictions personnelles, vos rêves pour les générations futures, vos obligations envers les ancêtres. Vous essayez de ne blesser personne et vous finissez par vous blesser vous-même.

 

Lorsque j’étais au caucus national, j’ai pris la parole pour dénoncer la règle de la deuxième génération lors d’un débat similaire sur la Loi sur les Indiens dans le cadre du projet de loi S-3 en 2018. On m’a accordé 90 secondes pour expliquer pourquoi cette discrimination détruit nos communautés. Deux ministres se sont ensuite levés pour contredire mes propos et ont parlé pendant 10 minutes. Je me souviens de leur malaise. Je me souviens aussi de mes collègues qui ne comprenaient pas pourquoi deux ministres adoptaient une position si dure. C’était pourtant clair. C’était la position du gouvernement. Ils savaient ce qu’ils faisaient. Ils savaient que le gouvernement protégeait un système qui garde nos peuples divisés et réduit notre nombre à chaque génération. Ils savaient qu’en freinant ces changements, ils refusaient à des enfants le droit de rester dans leur propre communauté.

 

La Loi sur les Indiens sert toujours les intérêts du gouvernement. Elle organise la disparition lente et administrative des Premières Nations. Sharon McIvor, militante infatigable, l’a rappelé cette semaine. Elle affirme que la loi est un document d’extinction. Si la règle demeure, plusieurs communautés n’auront plus aucun membre inscrit. Sans statut, nous perdons nos droits, et nos terres reviennent à la Couronne.

 

Dans ce contexte, Mandy Gull-Masty défend une position prudente. Elle affirme vouloir un chemin différent. Elle souligne que les outils nécessaires pour accompagner les communautés ne sont pas définis. Elle rappelle que les Premières Nations ne sont pas toutes identiques. Tout cela est vrai. Mais cela ne répond pas à la question essentielle. Devons-nous mettre fin à la discrimination maintenant ou poursuivre encore des consultations qui durent depuis des générations.

 

Je crois que si la ministre est crie, alors elle doit être une guerrière. Elle doit lever le poing et être prête à quitter son poste si le gouvernement refuse de reconnaître les droits fondamentaux des enfants de nos nations. Quand elle quittera la politique pour de bon, ce ne sera pas son titre ministériel qui comptera. Ce sera sa capacité à dire qu’elle a accompli quelque chose de valeur pour les générations à venir.

 

Je dis la même chose au député Jaime Battiste. Lui aussi doit écouter les esprits de ses ancêtres. La politique tente souvent de nous convaincre de jouer un long jeu. Mais le long jeu dans la Loi sur les Indiens est simple. Si nous attendons trop longtemps, il ne restera plus personne à protéger.

 

Aujourd’hui, le Sénat propose enfin d’abolir la règle de la deuxième génération. Le projet de loi passera ensuite à la Chambre des communes. Pour une fois, le chemin est clair. Fierté ou honte. Action ou immobilisme.

 

Il est temps que nos représentants aient le courage d’affirmer que le statut ne doit plus être un outil de division. Il doit être le reflet de notre lien vivant avec nos territoires. La ministre doit agir. Les députés doivent agir. Et nous devons rappeler au gouvernement que nos enfants ne sont pas négociables.

 

Quand le soleil se lève, nous offrons nos prières,
Le cœur du guerrier se tient toujours prêt,
Le courage toujours prêt,
Prêt à rencontrer les ancêtres.


https://ici.radio-canada.ca/espaces-autochtones/2135633/droit-naissance-premieres-nations-citoyennete

https://ici.radio-canada.ca/espaces-autochtones/2110788/c-38-reforme-loi-indiens

Ending Discrimination in the Transmission of Status: A Responsibility Larger than Any One Minister

I have been thinking for a long time about a question that comes up again and again in gatherings of First Nations. How do we end discrimination in the transmission of Indian status from one generation to the next. This question dominated a panel before the assembled chiefs in Ottawa this week. Bill S-2 is moving through the Senate, and for the first time in decades, it finally seems possible to eliminate the second generation cut off. And yet, at the heart of this debate stands a figure who touches me deeply, Minister Mandy Gull Masty.



I say it plainly. I feel sorry for her. Not out of condescension, but because she accepted a role that no Indigenous person should ever have to carry alone. She has become, despite herself, the modern Indian agent. She has become the person who must defend a system designed to reduce our numbers. She has become the public voice of a law that does not serve the interests of our peoples, but those of the Government of Canada.

When Justin Trudeau came to power in 2015, many wondered why no Indigenous MP was appointed Minister of Indian Affairs. After serving as an MP myself, I understand better. Once inside government asa Minister, you spend your days trying to balance too many contradictory responsibilities. You must first support the prime minister and the government line. Then you must try to meet the expectations of your people. You carry your personal convictions, your dreams for future generations, your obligations to the ancestors. You try not to hurt anyone and you end up hurting yourself.

When I was in national caucus, I spoke out against the second generation cut off during a similar debate on the Indian Act under Bill S-3 in 2018. I was given ninety seconds to explain why this discrimination destroys our communities. Two ministers then stood up to contradict me and spoke for ten minutes. I remember their discomfort. I also remember my colleagues, who did not understand why two ministers would take such a hard line. Yet it was obvious. It was the government’s position. They knew exactly what they were doing. They knew that the government was protecting a system that keeps our peoples divided and reduces our number with every generation. They knew that by slowing these changes they were denying children the right to remain in their own community.

The Indian Act still serves the interests of the government. It structures the slow, administrative disappearance of First Nations. Sharon McIvor, an indefatigable activist, reminded everyone of this again this week. She argues that the Act is a document of extinction. If the rule remains, many communities will eventually have no registered members at all. Without status, we lose our rights, and our lands revert to the Crown.

In this context, Mandy Gull Masty defends a cautious position. She says she wants a different path. She notes that the tools needed to support communities are not defined. She reminds us that First Nations are not all the same. All of this is true. But it does not answer the essential question. Do we end discrimination now, or do we continue consultations that have lasted for generations.

I believe that if the minister is Cree, then she must be a warrior. She must raise her fist and be prepared to leave her position if the government refuses to recognize the fundamental rights of the children of our nations. When she leaves politics for good, it will not be her ministerial title that matters. It will be whether she can say that she accomplished something of value for those who will come after.

I say the same to MP Jaime Battiste. He too must listen to the spirits of his ancestors. Politics often convinces us to play the long game. But the long game in the Indian Act is simple. If we wait too long, there will be no one left to protect.

Today, the Senate is finally proposing to abolish the second generation cut off. The bill will then move to the House of Commons. For once, the path is clear. Pride or shame. Action or stagnation.

It is time for our representatives to have the courage to say that status must no longer be used as a tool of division. It must be the reflection of our living connection to our lands. The minister must act. MPs must act. And we must remind the government that our children are not negotiable.

When the sun rises, we offer our prayers,
The heart of the warrior is always ready,
Courage always ready,
Ready to meet the ancestors.